Les YOUF

Probablement trois frères originaires de Normandie, qui exercèrent le métier d'ébéniste sous l'Empire et la Restauration.


Jean-Baptiste-Gilles YOUF
(30 mai 1762 - 1837)

Fils de Gilles Youf et de Jeanne-Marie Guérin, né à Bayeux le 30 mai 1762. Il était déjà établi à Paris lorsqu'il se maria le 9 novembre 1795 avec Anne Couard. A partir de 1799, il est cité dans les Almanachs du Commerce, 941, puis 35, rue du Bac, où ses frères vinrent peut-être le rejoindre, car on peut penser que, grâce à la proximité de l'hôtel de la rue de la Chaise, où habitait la princesse Elisa, sœur de Napoléon, celle-ci les choisit et leur demanda de venir à Lucques, où elle désirait établir une manufacture de meubles.

Il est difficile d'établir la part de chacun, mais il paraît probable que Jean-Baptiste-Gilles resta à Paris dans son petit atelier. Il fut créancier dans la faillite du marbrier C.F. Gillet puis, comme beaucoup de ses confrères, il fut touché par la crise et fit faillite le 19 décembre 1810. Il obtint un contrat d'union, le 7 août 1811. 

L'inventaire fait lors de sa faillite montre, d'après l'expertise de J.-B. Demay, qu'il comportait quatre établis, seulement une petite réserve de bois ordinaires et d'acajou, quelques meubles en acajou, commodes, secrétaires, tables à gradins et toilettes. Youf était absent lors de la pose des scellés ; c’était une amie, Louise-Victoire Janvier, qui devint ensuite sa seconde femme, qui y assista ; toutefois il revint pour l'évaluation de son atelier. 

La chute de l'Empire ne l'empêcha pas de continuer ses activités ; en 1814 - 1815, il obtint une importante commande de Morten-Michael Kallevig, habitant à Arendal en Norvège, de cent vingt chaises gondole en acajou, d'un meuble à hauteur d'appui en acajou, flanqué de cariatides en bronze doré et de candélabres portés par des femmes drapées en bois sculpté, posés sur deux colonnes et deux trumeaux. 

Musées

Norvège, Arendal, Aust-Agder-Museet : huit chaises gondole en acajou. Meuble à hauteur d'appui ouvrant par deux portes, un tiroir sous la ceinture, dessus de marbre. L : 1.25 m ; P 0.95 m. Deux candélabres formés de cariatides en bois sculpté, portant sur leur tête un candélabre à trois branches. Le tout posé sur une colonne cannelée en acajou. H de la colonne : 0.85 m ; H des candélabres : 0.77 m. Deux trumeaux en acajou et bronze doré. H : 1.85 m ; L : 0.98 m.


Jean-Baptiste YOUF


Fils de Gilles Youf et de Jeanne-Marie Guérin, qui s'établit avec son autre frère Sébastien en Italie, où l'un des deux (ou les deux) créa une manufacture à Lucques sur la demande de la princesse Élisa en 1805. 

L'établissement fut installé d'après les ordres de la princesse à Lucques dans une partie du monastère des Carmélita. Sous l'impulsion d’Élisa, qui lui fit meubler les palais de sa nouvelle principauté, l'entreprise prit rapidement une grande extension ; en 1807, il se plaignait de manquer d'ouvriers. 

En 1808, Elisa devint grande duchesse de Toscane et, résidant souvent à Florence, elle chargea Youf d'une grande partie de l'ameublement des appartements du palais Pitti ; elle obtint alors de l'Empereur de faire payer un certain nombre d'objets par le Garde-meuble, ce qui permet aujourd’hui de retrouver aux Archives nationales le libellé exact des commandes.

Tout prouve l'importance de la manufacture Lucquoise, qui a dû être une des plus importantes de Toscane. En 1811, les demandes, pour obtenir des ouvriers, sont signées par Sébastien ; et le 26 août, on lui réclame les meubles qu'il devait livrer pour Florence : on les attend pour garnir un château que S.A.I. ne peut habiter par ce retard. Il est donc très difficile de différencier l’œuvre des Youf. En Italie, il continua à livrer de beaux meubles, pour les Bourbon, exécutés vers 1818 et conservés au palais Pitti (ces meubles portent le chiffre C.-B. couronné). On ignore jusqu'à quel âge il continua à travailler. Il resta peut-être seul en Italie puisque nous retrouvons Sébastien à Paris en 1819.

Commandes Officielles

  • Palais Pitti, pour S.A.I. la grande duchesse en 1812 : un grand lit, 2 100 F ; une table à coulisse d'acajou à 1 800 F. 
  • Pour la résidence de Marlia, pour la grande duchesse, en 1812 : un secrétaire en orme à 1 000 F, et une table à déjeuner de même bois à 200 F.
  • Pour le palais de Lucques, le 21 mars 1812 : quatre tables à jeux en bois d'acajou, couvertes en drap vert, et quatre autres tables en acajou.

Musées

Palais Pitti : secrétaire à abattant en acajou et bronze doré, le bas à trois tiroirs, flanqué de quatre griffons en bronze doré, le haut à abattant surmonté d'une pendule. Signé ; vers 1818. Guéridon en acajou et bronze doré, porté par trois groupes de deux petites colonnes décorées de guirlandes de lierre en bronze doré, dessus de marbre granit d'Elbe. Grand bureau à coffre double face en acajou, posé sur un socle ; il comporte trois tiroirs de chaque côté, et un grand tiroir sous la ceinture ; à chaque angle deux colonnes accouplées. Signé Youf, ébéniste de la grande duchesse de Toscane, rue Neuve à Lucques, 1809.

Collections Particulières

Table à écrire de forme ovale en acajou et bronze doré, posée sur un socle ; deux pieds en forme de lyre. Castello, villa Petraia (Repr. dans J.-B. Youf par Derrick Worsdale).



Sébastien YOUF


D'après plusieurs textes tirés des archives de Lucques, c'est lui qui est indiqué comme ébéniste de la princesse Élisa en 1807 et 1811 ; il réclame des ouvriers, puis se fait réprimander car il est en retard dans ses livraisons.

 Après la chute de l'Empire et le départ de la princesse Élisa, il revint à Paris ; une facture datée de 1819 indique qu'il est fabricant de meubles en acajou ; il tient une fabrique et un magasin de meubles des plus assortis et du plus nouveau goût, tient aussi les albâtres, qu'il devait se faire envoyer d'Italie.

Installé 28, rue de Cléry en 1819, puis 43, boulevard Saint-Martin, il s'établit 48, rue Meslay de 1827 à 1842. Il présenta à l'Exposition des produits de l'industrie française de 1827 deux tables de salon de fort bon goût et d'un beau travail, et obtint une médaille de bronze pour ces meubles parfaitement exécutés.

Il n'obtint pas le rappel de sa médaille en 1834, mais M. de Moléon, l'un des rapporteurs du jury signalait alors que "...ce n'a pu être que l'effet d'une omission...car M. Youf la mérite d'autant plus [...] que son exhibition était manquante".

Il fit faillite le 5 novembre 1841 ; l'actif était de 32 000 F  et le passif de 21 961 F. Il obtint son concordat en mars 1842, mais il dut abandonner l'actif.

Musées 

Musée national de château de Fontainebleau : guéridon en acajou orné de bronze doré, porté par cinq pieds en console sur un socle en étoile, dessus de marbre blanc. Il fut envoyé en 1863 à Fontainebleau pour l'appartement du Prince Jérôme ; estampillé.



Musée national du château de Fontainebleau


Collections Particulières

Grand Guéridon en acajou et bronze doré, porté par cinq pieds en console, posé sur un socle en étoile, le bas des pieds orné de têtes de sangliers et le haut de cornes d'abondance ; dessus de marbre blanc. (Torino, galleria C. et G. Rossi)


 Turin, Anc. coll. C. et G. Rossi

Ventes

Semur-en-Auxois, 12 octobre 1986 : console en acajou ornée de bronzes dorés, assortie au guéridon conservé au château de Fontainebleau. Repr. in Gazette de l'hôtel Drouot n° 34, 1986
Hôtel Drouot, 2 décembre 1987, n° 127 : travailleuse en placage d'érable moucheté et filets d'amarante, la partie haute en forme de coffret à couvercle à doucine et base arrondie. Elle repose sur un piétement en X relié par une tablette ovale. Elle ouvre par un tiroir à nombreux casiers. Époque Charles X. Estampille de Youf. H : 0.80 m ; L : 0.55 m ; P : 0.39 m


Bibliographie

"Le Mobilier Français du XIXème Siècle"
  Denise Ledoux-Lebard
  Les Éditions de l'Amateur - 1984