Les Oppenordt


Alexandre-Jean OPPENORDT
vers 1639 -1715

Ébéniste ordinaire du Roi


Alexandre-Jean Oppenordt est né vers 1639 à Gueldre, ville des Pays-Bas, alors sous domination espagnole. Il était le fils d'Henri Oppen Oordt et de Marie Tendart.
Il vint se fixer à Paris au début du règne de Louis XIV et travaillait dans l'enclos privilégié du Temple, lieu où des ébénistes pas encore reçus à la maîtrise pouvaient exercer leur métier.
Il épousa une Française du nom de Judith Favier, qui lui donna trois enfants et dont un seul lui survécut, Gilles-Marie Oppenordt, le célèbre architecte et ornemaniste de la Régence.
En 1679, il obtint sa naturalisation. L'acte le décrit comme "compagnon menuisier en ébène...natif de la ville de Gueldre, faisant profession de la religion catholique".

En mars 1684, il reçut un logement aux galeries du Louvre, preuve de la reconnaissance royale et commença à travailler pour le service des Bâtiments du roi.
Cette même année, il fut payé 3600 livres pour "douze cabinets de marqueterie qu'il a faits pour les médailles de Sa Majesté, à raison de 300 L chacun". Ces cabinets furent placés à Versailles dans les niches du cabinet des Curiosités aussi appelé cabinet des Médailles et furent complétés par un bureau somptueux dessiné par Berain (au prix de 6500 L) et quatre autres cabinets de bois de violette.
Devenu ébéniste ordinaire du Roy, il habitait rue Fleury près de Saint-Germain l'Auxerrois et devant l'horloge Saint-Honoré.

Entre 1684 et 1686, il exécuta le parquet de la petite Galerie de Louis XIV à Versailles. Il travailla également pour Louvois, réalisant deux cabinets en pietra dura qui seront mentionnés dans l'inventaire après décès de ce dernier en 1693. Un dessin de Bérain représentant un projet de cabinet de pietra dura aux armes de Louvois est sans doute le seul témoignage que nous possédions de ces deux œuvres. Il atteste encore une fois de la collaboration entre Bérain et Oppenordt.

Projet de cabinet pour Louvois

Cela autorise à attribuer à Oppenordt, l'exécution de deux œuvres dessinées par Berain : la commode en sarcophage de la Wallace Collection réalisée d'après une gravure de Berain datable, selon Jérôme de la Gorce, vers 1690-1695


 Wallace Collection

 et le sol en marqueterie d'écaille du carrosse royal de Stockholm exécuté à Paris en 1696.

Parquet du carrosse royal

On voit que, dans les années 1690, en raison des manques de crédit dûs à la guerre contre la Ligue d'Augsbourg, les commandes issues du service des Bâtiments du roi sont arrêtées mais qu'Oppenordt continue de toucher ses gages de 30 L en tant que menuisier du roi.
Ses trente dernières années d'activité sont méconnues, mais l'on sait qu'il les consacre à une clientèle privée, parmi laquelle figurait probablement le comte de Toulouse, père du duc de Penthièvre.
Alexandre-Jean Oppenordt mourut à Paris le 16 avril 1715. 


"Du mercredy dix-septième (avril 1715). Alexandre-Jean Oppenord, ébéniste ordinaire du Roy, veuf de Judith Favier, âgé de 76 ans ou environ, décédé hier, à midy, rue Champfleury, a été inhumé en présence de Gilles-Marie Oppenord, premier architecte de S. A. R. Monsgr le duc d'Orléans, fils du deffunct; de Charles Nocret, écuyer, premier valet de garde-robbe de S. A. R. Monsgr le duc d'Orléans, et d'Alexandre-Jean-Baptiste Oppenord, petit fils du deffunct, qui ont signé."  (St-Germ.l'Aux.)


Alexandre-Jean OPPENORDT
around 1639 -1715

Ébéniste ordinaire du Roi


Born in the Netherlands in 1639, Oppendordt was the son of Henri Oppen Oordt and Marie Tendart. He established himself in Paris at the beginning of Louis XIV's reign and worked in the privileged quarter of the Temple, the area where événistes not yet become master could practise their craft. In 1679, he was naturalized. His papers described him as "compagnon menuisier en ébène...native of the town of Guelder, professing the Catholic religion". In 1684, Oppenordt obtained lodgings at the Louvre and began work in the service of the Bâtiments du Roi.

In early 1684, he was paid 3,600 livres for "twelve marquetry cabinets which he made for His Majesty's medals, at 300 livres each". These cabinets were installed at Versailles in niches in the Cabinet des Curiosités also called the Cabinet des Médailles and were complemented by a somptuous bureau (for a sum of 6,500 livres) and four other cabinets in kingwood. The great desk was designed by Berain and the bronze mounts for the desk were modelled by Le Hongre and Charmenton and cast by Le Nègre.
Between 1684 and 1686, Oppenordt made the parquet for Louis XIV's Petite Galerie à Versailles. During these years he was also working for Louvois, making two pietra-dura cabinets for him which are mentioned in the inventory drawn up after the latter's death in 1693. A drawing by Berain for a cabinet in pietra-dura with the arms of Louvois is probably the only surviving evidence we have of either of these pieces. It once again confirms the collaboration between Berain and Oppenordt.

The Swedish envoy Cronström mentions in a letter in 1693 that Berain habitually used his team of craftsmen for ébénisterie commissions he had received: 'I do not know whom to recommend to make tables and guéridons. Cucci is excellent. On the other hand Berain has admirable designs and skilled craftsmen..." In the author's opinion this refers to Oppenordt, and therefore one may attribute to him two works that were desinged by Berain: the sarcophagus-shaped commode in the Wallace Collection, after an engraving by Berain which can be dated, according to Jérôme de la Corce, to c. 1690-95, and the flooring in tortoiseshell marquetry of the royal coach in Stockholm, executed in Paris in 1696. In the 1690s Oppenordt continued in the service of the Bâtiments du Roi but received no further commissions, all projects being brought ot a halt by the lack of funds due to the War of the League of Augsburg. He could therefore concentrate on his private clientèle.
He died in 1715.
 


Gilles-Marie OPPENORDT
Paris 27 juillet 1672 - Paris 13 mars 1742

Ornemaniste et Architecte


F
ils de Alexandre-Jean Oppenordt, Gilles-Marie Oppenordt naquit à Paris, le 27 juillet 1672. Il dût au milieu d'artisans protégés par le roi et logés au Louvre, dont il faisait partie, de recevoir
une formation très complète. Envoyé à Rome, il réalisa un grand nombre de dessins d'après l'antique et d'après des édifices du Bernin et de Borromini, mais aussi, fait plus rare à une époque où les artistes s'intéressaient à Rome avant tout, il étudia en Italie du Nord les œuvres de Palladio et de Bramante. À son retour en France, il ne put s'intégrer aux équipes de Versailles, Hardouin-Mansart lui préférant Lepautre, et il se consacra surtout à des projets d'églises, dont la tendance baroque est nettement marquée. Sa première grande commande, l'hôtel de Pomponne, date de 1714. Les boiseries, connues par ses dessins, sont caractérisées par une très grande richesse décorative : des trophées de chasse sont suspendus à des arbres très naturalistes. Dans les panneaux secondaires, il adapte, pour la première fois, à la sculpture des boiseries des motifs en arabesques : rinceaux, lambrequins, etc.
Son originalité, pour l'époque, réside surtout dans l'utilisation nouvelle de certains éléments décoratifs. Il donnera toute la mesure de son talent, lorsqu'il sera nommé premier architecte du duc d'Orléans. Il travaille, alors, au Palais-Royal, en commençant par les appartements privés du duc avant les grands appartements. Oppenordt peut appliquer dans ces appartements ses théories sur le décor libre. Il y utilise certains éléments qui se retrouvent dans le style Louis XV, les panneaux encadrés de baguettes qui s'incurvent  de haut en bas, les motifs de fleurettes stylisées, les ailes de chauve-souris, les coquilles déchiquetées... Pourtant, Oppenordt est contenu dans ses travaux par le poids de sa formation italienne. Les éléments architectoniques restent primordiaux pour lui, et certaines réminiscences du baroque italien, son âge aussi peut-être, font qu'on ne peut pas vraiment le considérer comme un fondateur du style rocaille au même titre que Meissonnier ou Pineau mais seulement comme un précurseur. A l'instar de François-Antoine Vassé, son contemporain, Oppenordt demeure le grand artisan du style Régence.
L'abondance de ses dessins (plus de deux mille), rachetés en 1742 par le graveur Huquier, qui les publia à partir de 1748 dans des recueils familièrement désignés sous les noms de "Petit, Moyen et Grand Oppenord" lui assura, pendant tout le 18ème siècle, une très grande célébrité.


Gilles-Marie OPPENORDT
Paris 1672 - Paris 1742

Designer and Architect


A prolific and imaginative draftsman, Gilles-Marie Oppenordt produced creative designs for everything, from buildings to book illustrations. Son of the ébéniste Alexandre-Jean Oppenordt, Gilles-Marie grew up in the palace of the Louvre, where his father was given an apartment by the king. The young designer received his training in Italy, where he studied architecture and copied Roman monuments. Upon his return to France, he became the "Directeur général des Bâtiments" (Director of Buildings) to the duc d'Orléans in 1708. Even before the duc became the regent of France, Oppenordt's career flourished with this powerful man as his patron. He was soon remodeling the duc's palace, the Palais-Royal, where he designed the complete interior and all its furnishings, from wall paneling and chimneypieces to clocks, chandeliers, mirrors, and candlesticks.

Royal patronage cemented his reputation, and Oppenordt soon received many other commissions for private projects. Designs made for the Roman Catholic Church also occupied him: he executed one of his most important projects as chief architect of the Church of Saint-Sulpice in Paris. At the end of his life, when architectural commissions dwindled, Oppenordt produced ornate designs for books, including letters of the alphabet and elaborate borders for texts. His drawings were engraved and published after his death. 


Bibliographie

"Les Ébénistes Français de Louis XIV à la Révolution"
  Alexandre Pradère
  Sté Nlle des Editions du Chêne - 1989

"French Furniture Makers from Louis XIV to the Revolution"
  Alexandre Pradère
  Sté Nlle des Éditions du Chêne - 1989